Un petit article pour vous présenter un auteur d'Isan,
que je viens de découvrir
Pira SUDHAM
Pira SUDHAM est né en 1942 dans une famille de paysans pauvres d'Isan dans le village de Na Pho dans la province de
BURIRAM.
A quatorze ans, il part étudier à BANGKOK où il devient un « Wat Dek » à savoir un garçon qui aide les moines (jeune homme vivant dans un temple et assistant les moines).
Pour subvenir à ses besoins il vend des souvenirs aux touristes dans les rues de BANGKOK.
Il étudie ensuite à l' Université CHULALONGHOM de BANGKOK où, remarqué par ses professeurs, il obtient une bourse du gouvernement de la Nouvelle Zélande pour aller étudier dans ce pays.
Il y poursuit des études d'anglais et de littérature d'abord à l'Université d'AUCKLAND, puis à celle de VICTORIA et enfin à l'Université de WELLINGTON.
En Nouvelle-Zélande, il écrit des histoires courtes qui sont publiées chaque trimestre par les Editions LANDFAL PRESS.
Ces histoires seront la trame de son premier livre " Siamese Drama " qui sortira en 1983.
Il faut noter que toute son oeuvre a été publiée dans sa version originale (en langue anglaise) en Australie, aux Etats-Unis, à HONG KHONG et en Thaïlande mais que la plupart de ses romans ont été traduits dans de nombreuses langues comme l'allemand ou le français.
Très lu et très apprécié, ses œuvres ont donné une voix
aux pauvres de Thaïlande mais surtout
à ceux d'Isan.
Pira SUDHAM apporte la lumière dans la vie des gens ordinaires qui vivent dans l'obscurité au sein de villages reculés d'Isan.
Avec l'habileté et le savoir d'un écrivain sensible, il transmet la voix intérieure de ses sujets qu'ils soient analphabètes, timides ou insignifiants comme ils apparaissent et sont dans leur vie quotidienne.
Pour évoquer cette simplicité et cette sensibilité il emploie une prose claire et directe.
A la différence de nombreux autres auteurs thaïs Pira SUDHAM écrit à propos de son peuple et de son pays comme on le voit de
l'intérieur.
"In my mind I carry memories of childhood, of life in villages, much as a pregnant woman carrying a child.
Every day these images grow, and I know that one day I shall have to give birth to them through the medium of writing.
Besides, I don't want people in our villages, so far removed from other peoples because of distance and poverty, to be born, suffer and to die in vain."
Pira Sudham
LA PLUIE
Poème inspiré de la première nouvelle
Du livre Enfances thaïlandaises.
Sécheresse – Vent – Poussière - Famine
Enfants qui observent…
Enfants qui observent et ne comprennent pas,
Ils ne sont pas admis dans la douleur des adultes.
Sécheresse – Vent – Poussière - Famine
Ils ne peuvent que regarder
Regarder les rites magiques,
La sauvagerie désespérée…
Que regarder le dernier espoir
Quand les ressources humaines ont échoué.
Enfants qui observent et ne comprennent pas
Les rites accomplis par les anciens.
Sécheresse – Vent – Poussière - Famine
Et toucher le fond du désespoir
Si son ami s’en va.
Sécheresse – Vent – Poussière - Famine
Un enfant s’offre en sacrifice aux Puissances.
Lui, si petit, ne pourra manquer d’être pris en pitié
Tout en utilisant sa propre expérience de vie, l'auteur met en scène les personnages et les
circonstances de la vie des villageois d'Isan.
Ses œuvres sont très critiques de l'ignorance organisée et de la corruption érigée en système.
Nominé pour le prix Nobel 1990 de littérature même si ceci ne fait pas de lui un « grand écrivain » Pira Sudham a mis en évidence son importance comme un écrivain qui croit que la littérature peut améliorer la compréhension entre les différentes cultures et le changement social.
Il parle au nom du peuple de l'Isan
qu'il appelle Esarn, cette partie de la Thaïlande la plus économiquement et politiquement défavorisée.
Dans chacune des principales œuvres il rédige une introduction dans laquelle il fait valoir le lien entre son écriture et son peuple.
« Nos vies sont soumises à la merci de la nature: inondations, sécheresse, maladie, et
rareté.
Avec endurance, nous acceptons notre destin en tant que quelque chose dont nous ne pouvons aller à l'encontre.
Je connais la bonhomie, l'hospitalité et l'analphabétisme de notre peuple ainsi que l'égoïsme et la corruption.
Je connais l'arrogance des commerçants, des intermédiaires et leur ignorance....
Ce que j'ai vu et appris dans l'enfance m'a profondément touché »
Il déclare aussi qu'il veut trouver une place dans la littérature pour les pauvres de Thaïlande, de sorte qu'ils ne vivront plus inaperçus et qu'ils ne mourront plus en vain ».
Dans l'accomplissement de cet engagement (et toute son écriture est dominée par la «grande plaine" de l'Isan, même si son action extérieure se produit en Europe), Sudham reste honnête sur les
aspects positifs et négatifs de la vie dans cette région.
Ses Œuvres
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1983 : Siamese Drama, The Shire Books, BANGKOK
Collection d'histoires courtes, paru en 1983
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1987 : People of Esarn, The Shire Books, BANGKOK
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1988 : Monsoon Country et 1989 Terre de Mousson (Traduction)
Premier roman,
Monsoon Country a été publié en 1988
L’itinéraire au sens physique et spirituel du jeune Prem, sixième enfant d’une famille de paysans, qui vit dans la région la plus pauvre de la Thaïlande, l’Isan, au nord-est du pays près de la frontière cambodgienne voilà l’argument du roman Terre de Mousson, titre anglais : Monsoon Country.
Comme les enfants de son âge et de sa condition sociale, Prem garde les buffles dans les rizières qui entourent son village.
Il va aussi à l’école communale et son maître l’encourage à poursuivre ses études, d’abord secondaires puis universitaires.
Le sentiment qu’il a besoin de parfaire son éducation à l’étranger et l’obtention d’une bourse d’études vont le conduire en Angleterre.
Il y découvrira le mode de vie occidental, l’appétit de consommation et l’importance attachée au paraître.
Ses études achevées il se détachera pourtant très vite de ce monde qu’il devine d’illusion et retournera près de sa famille.
Il décide alors d’embrasser la vocation monastique et de servir le Bouddha.
Opposition entre valeurs traditionnelles et valeurs modernes, pureté du monde paysan et corruption de l’univers des villes, les antagonismes que l’on devine puisés aux sources autobiographiques ne manquent pas dans ce roman initiatique, et rafraîchissant comme une pluie de mousson.
Et l’envie de partir visiter cette province pauvre
du royaume de Thaïlande
vous gagne après avoir lu le roman.
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1990 : Enfances thaïlandaises, Fayard, PARIS
« Dans ce livre, comme dans le précédent de l’auteur, (Terre de mousson, éd. Olizan, Genève, 1989), c’est le cœur de la Thaïlande qui bat, c’est l’âme des «petits», des humbles, de ceux des campagnes qui se désertifient, de ceux des poches de misère créées par la grande ville et son essor.
C’est le cœur, le souffle d’un peuple en marche dans un monde en mutation, où tout va si vite que certains s’essoufflent à courir et s’arrêtent en bordure du chemin, que certains perdent leur âme dans le clinquant de la modernité.
C’est le cœur, le souffle d’un peuple du courage où il n’est plus toujours possible de croire en l’immuabilité des choses, quand chaque jour il faut se recréer de nouveaux repères.
Le ton du livre sonne si juste à mon oreille que sur chaque personnage décrit, je peux mettre un visage, un nom, d’un de ceux que pendant plusieurs années j’ai rencontrés, connus, aimés dans les rues et bidonvilles de Bangkok.
Seul regret que j’adresserais à Pira Sudham : les petits, les humbles – qu’il doit beaucoup aimer pour en parler si bien – ne liront pas son livre. Son chant ne sera pas caresse à leur oreille, car ses livres, celui-ci comme les autres, Pira Sudham les a écrits en anglais.
Mais je souhaite que beaucoup puissent savourer ce livre.
Car l’auteur a su, malgré la langue étrangère, rendre la bonne tonalité, conserver toute la poésie contenue dans la langue thaï et permettre aussi à des Farangs ( étrangers blancs) d’entrapercevoir l’âme thaïlandaise.
Un conseil : lisez et relisez encore le prologue.»
Cathérine Theurillat. «A propos d’un livre». Revue Quart Monde,N°147
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1996 : Tales of Thailand, Rothershire Rdition, BANGKOK
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2002 : The Force of Karma
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2004 : Shodowed Country :DCO Books, BANGKOK
Quand il célèbre les rituels religieux et les cycles de vie qui imprègnent la vie de son village avec cohérence et calme, il expose en même temps la corruption des responsables locaux, l'attrait des villes et la prostitution, la honte de nombreuses personnes déplacées, les ambiguïtés du changement (en particulier de l'occidentalisation), et le rêve révolutionnaire qui persiste après les massacres d'Octobre 1973, de 1976 et le 18 mai 1992.
Alors qu'il peut en toute confiance et inconsciemment, appeler au symbolisme naturel et religieux qui fait toujours partie intégrante de la vie rurale thaï, il représente son peuple avec le détachement objectif d'un réalisme social.
Il est un garçon du village qui, grâce au sacrifice de ses parents, quitte la maison pour le bien de l'éducation, passe du temps dans un monastère de Bangkok, gagne une bourse pour étudier en Angleterre, et renonce finalement aux plaisirs de la culture européenne préférant rentrer chez lui et tenter une réinsertion difficile.
Revenu dans son village natal de Na Pho, Pira Sudham partage dorénavant sa vie entre l'Europe et la Thaïlande.
Sous les auspices du Pira Sudham Estate, il a fondé une école dans son village et s'occupe de diverses
oeuvres de dévéloppement.
Gérard et Leuagn
เจอหรารด์และเหลือง